LA MORT DE LOUIS XIV
Le 10 août 1715, à son retour de chasse à Marly, Louis XIV ressent une vive douleur à la jambe. Fagon, son médecin personnel, diagnostique une sciatique et ne changera plus d’avis. Bientôt des taches noires apparaissent sur la jambe. C’est la gangrène sénile. Malgré des douleurs atroces, le roi vaque à ses occupations habituelles. Il est décidé à assumer ses fonctions jusqu’au bout. Le 25 août, le roi doit s’aliter et ne quittera plus sa chambre. La gangrène atteint l’os le 26. Louis XIV est dans un semi-coma les 30 et 31. Il meurt le 1er septembre 1975, quatre jours avant son 77e anniversaire, au terme d’un règne de 72 années. Voilà pour l’Histoire.
Avec La mort de Louis XIV, le cinéaste catalan Albert Serra se penche sur une lente agonie et signe une oeuvre magistrale qui, au-delà du regard sur un corps qui tombe, livre autant un portrait de la mort à l’oeuvre dans sa matérialité quasiment clinique mais aussi une réflexion, dans une somptuosité de la pompe, sur un roi mourant dont le corps se confond avec l’Etat. Alors que le monarque se fige peu à peu dans une royale immobilité, Serra observe le ballet de médecins qui dissertent sur les causes du mal, des praticiens souvent pontifiants qui semblent parfois sortir des pièces de Molière, y compris lorsqu’ils sont rejoints par un charlatan prétendant disposer d’un remède miracle…
Dans cette oeuvre dominée par la couleur rouge, Albert Serra réussit la prouesse de ne jamais lasser alors même que l’action se réduit à peu de choses. C’est bien entendu l’interprétation de Jean-Pierre Léaud qui emporte l’adhésion. L’ancien double de François Truffaut dans la peau d’Antoine Doinel, incarne, ici, un souverain à l’extravagante perruque, qui tente de masquer ses souffrances pour donner une image honorable de sa grandeur. Le cinéaste ausculte le masque cireux du roi auquel le comédien de 72 ans apporte, avec un ton de voix précis et triste, une profonde intensité et une vérité émouvante.
Dans les suppléments du dvd, Albert Serra analyse des images de son film et souligne notamment la poésie dans le travail d’acteur de Léaud. On découvre aussi une conférence de l’historien Joël Cornette sur La mort de Louis XIV et son contexte historique.
(Capricci)