Le serial-killer, la star montante et l’aventurier vulnérable
NASSE.- Grand costaud au sourire charmeur, Cooper Adams est un père de famille que son adolescente de fille Riley adore… surtout depuis qu’il a pris des places pour le concert de la pop-star Lady Raven. Trop stylé, dit la gamine. S’il s’occupe parfaitement de Riley, Cooper semble constamment aux aguets. Son regard balaye de part en part la grande salle de concert. Partout, de nombreux policiers barrent les entrées et les sorties tandis que, sur le parvis, les véhicules du FBI s’alignent en rangs serrés. Grâce au sympathique Jamie, vendeur à la boutique de t-shirts dans l’enceinte de la salle, il apprend que la police, dirigée par une profileuse, a décidé de se servir du spectacle pour prendre au piège un tueur en série connu sous le nom du Boucher. Pris dans la nasse, Cooper va tenter de quitter les lieux…
Avec Trap (USA – 1h45. Dans les salles le 7 août), M. Night Shyamalan (qui a connu, en 1999, son premier grand succès, tant commercial que critique, avec Sixième sens) s’éloigne quelque peu de sa veine fantastique habituelle pour s’inscrire dans le genre serial-killer. Mais, ici, point de suspense. On comprend, dès les premières minutes, que le « gentil » Cooper n’est autre que le tueur recherché par toutes les forces de l’ordre. L ‘intérêt de Trap réside alors dans le portrait d’un type sacrément malade de la tête, à la fois bon père de famille et tueur froid, prêt à tout pour protéger les siens et disposé sans sourciller à asphyxier au monoxyde de carbone un malheureux enfermé dans une cave.
« J’aime le histoires sombres. J’aime les dénouements complexes » disait M. Night Shyamalan. Ici, c’est surtout la salle de spectacle qui est sombre pour mettre en lumière la prestation de la frêle Lady Raven. De fait, on sent que le cinéaste a spécialement peaufiné cette dimension de son film. « Nous voulions créer une expérience cinématographique où la musique fait vraiment partie de la structure de l’histoire. Cela nous a pris deux ans pour trouver la structure parfaite pour cette intrigue mais je pense que nous avons réussi notre pari. » Le réalisateur a confié à sa fille Saleka, 28 ans, le soin d’incarner la chanteuse pop mais aussi de coécrire, coproduire, mettre en scène le show et interpréter toutes les chansons originales intégrées dans un vrai concert live. Seuls les spectateurs sont moins nombreux qu’il n’y paraît. Grâce aux effets visuels, les 300 personnes présentes au concert ont été multipliées de manière à remplir les 15 000 places du concert.
Reste enfin à imaginer comment Cooper Adams va sortir d’une nasse bien close…
Pour porter le personnage du serial-killer, le cinéaste a trouvé un interprète de choix. Josh Hartnett s’est fait connaître, dans le genre horrifique, en jouant le fils de Jamie Lee Curtis dans Halloween, 20 ans après (1998) et a souvent incarné ensuite, des personnages complexes comme le flic Bucky Bleichert dans Le dahlia noir (2006) de Brian de Palma. Avec le regard qui dérape, le sourire qui vire au rictus, son Boucher a de quoi faire peur. Et c’est bien ce que recherche Trap.
HORREUR.- Sur les images en noir et blanc d’un film amateur, une charmante petite fillette blonde sourit et répond gentiment à son père : « Je n’accepterai jamais une vie que je ne mérite pas ». Nous sommes en 1959. Nous retrouvons, en 1985, Maxine Minx. La fillette est devenue une belle jeune femme qui a fait son chemin dans les films pour adultes. Mais Maxine en a assez du X et aspire à devenir une actrice de cinéma classique. Lors d’un casting pour La puritaine II, elle réussit à convaincre les producteurs et la rude réalisatrice Elizabeth Bender de lui confier le personnage principal de cette suite d’un film d’horreur à succès. La carrière hollywoodienne de Maxine Minz est désormais sur la bonne voie. Mais c’est sans compter sur un tueur en série, surnommé le Traqueur de la nuit, qui fait régner la terreur à Los Angeles en assassinant de jeunes starlettes et en marquant leurs cadavres du sceau de la Bête…
MaXXXine (USA – 1h44. Interdit aux moins de 12 ans. Dans les salles le 31 juillet) est le troisième et dernier volet d’une trilogie entièrement réalisée par l’Américain Ti West. En 2022, X racontait, dans une ambiance grindhouse, les aventures de la jeune Maxine partant, en 1979, tourner, avec une petite équipe, un film pornographique dans une ferme du Texas, propriété d’un vieux couple, Pearl et Howard. Ceux-ci, découvrant le genre du film, vont provoquer un massacre. Dans la foulée, West met en scène Pearl, préquelle de X, qui s’attache au personnage de Pearl et explore ses origines.
Si Maxine a survécu au massacre orchestré par Pearl et Howard, elle continue à être hantée par les événements de 1979. Et cela déteint évidemment sur son parcours hollywoodien d’autant qu’un détective privé particulièrement tordu (Kevin Bacon) est accroché à ses basques. Heureusement, Maxine peut compter sur son agent dont les méthodes ressemblent singulièrement à celles des meilleurs membres de Cosa Nostra. Avec pas mal de sang, de crâne fracassé mais aussi d’humour, Ti West s’amuse avec les codes du film d’horreur. Poursuivie par une paire de flics persuadés qu’elle en sait plus qu’elle ne veut bien dire, Maxine fait d’ailleurs front avec beaucoup d’aplomb à toutes les misères qui lui tombent dessus. Il est vrai qu’elle est habitée par un désir irrépressible : devenir une star d’Hollywood.
« Maxxxine, dit la comédienne Elizabeth Debicki, est une lettre d’amour aux années 80, au cinéma des années 80 et au cinéma en général : c’est un film à l’intérieur d’un film… » De fait, ce dernier volet de la trilogie est bien l’occasion pour le cinéaste de rendre hommage au cinéma américain, serait-il de série B, en se glissant dans les coulisses d’un tournage, en poussant la porte des plateaux et en multipliant les clins d’oeil -les fans d’Hollywood savoureront le jeu de piste- à Theda Bara, l’un des premiers sex-symbols de la cité des rêves, à Norman Bates et au motel de Psychose, au Dahlia noir, à Buster Keaton, à Marilyn Chambers et Behind the Green Door et même à l’immense Bette Davis qui, en matière de monstre et de dureté à Hollywood, en connaissait un rayon. Assurément, l’Anglaise Mia Goth, vedette de ce thriller psychosexuel, semble marcher dans ses traces.
ACTION.- Au fin fond de la campagne thaïlandaise où il vient souvent se ressourcer, Largo Winch se recueille sur la tombe de son jeune épouse trop tôt disparue. A ses côtés, Noom, 15 ans, son adolescent de fils qui, rebelle, reproche à son père de n’être qu’un homme d’affaires sans égard pour l’avenir de la planète. De fait, Largo n’est pas aussi « mauvais » que cela puisque ce multimilliardaire à la tête d’un groupe planétaire, cherche bien à dépolluer son entreprise et à devenir plus conscient des enjeux environnementaux. D’ailleurs, il caresse le projet de présenter bientôt au monde Noom Challenger, un avion 100 % vert… Mais, quasiment sous les yeux de son père, le garçon va être être enlevé par des hommes lourdement armés. Au prix d’une course folle à moto, Largo réussit à neutraliser les kidnappeurs mais père et fils, dans leur fuite, vont chuter dans un lac. Largo revient à la surface. Mais point de trace de Noom… Largo ne peut cependant se résoudre à la disparition de son fils. Et il ne va pas être au bout de ses peines avec son empire financier.
Héros de six romans et d’une série (24 albums à ce jour) de bandes dessinées, Largo Winch a été créé, au début des années 70, par l’écrivain belge Jean Van Hamme (avec le dessinateur Philippe Francq (pour les BD) et a donné lieu à trois films : Largo Winch (2008), Largo Winch 2 (2011), les deux mis en scène par Jérôme Salle et donc Largo Winch : le prix de l’argent (France – 1h40. Dans les salles le 31 juillet) réalisé par Olivier Masset-Depasse qui adapte les tomes 13 et 14 et signe, ici, son premier film d’action.
De fait, comme le dit un personnage, « Il ne fallait pas le réveiller ! » Car, patron avisé et réfléchi, Largo Winch se transforme en père vengeur et en homme d’action qui ne craint pas d’aller au contact. S’il doit faire face à toutes les vilenies et traîtrises possibles de la part de ses associés et partenaires, Largo devra encore plus se colleter avec un tueur (James Franco) d’autant plus redoutable qu’il est insensible au mal et qu’il a un compte personnel à régler avec la famille Winch.
Avec parfois un petit côté 007, les scènes d’action de ce divertissement musclé sont bien menées. Tomer Sisley campe un Largo vulnérable et faillible, un peu « ancien monde » mais il va faire la preuve que s’il est un boomer, il n’est pas bon à jeter. Même Bonnie (Elise Tillovoy), la très jeune militante et influenceuse, qui l’asticote volontiers, devra en convenir.