L’AMOUR FOU ET LA MEMOIRE DE NICKY
L’EMPIRE DES SENS
Dans les quartiers bourgeois de Tokyo en 1936, Sada Abe, ancienne prostituée devenue domestique, aime épier les ébats amoureux de ses maîtres et soulager de temps à autre les vieillards vicieux. Attiré par elle, Kichizo, son patron, bien que marié, va l’entraîner dans une escalade érotique sans bornes. Partagé entre ses deux maisons, celle qu’il partage avec son épouse et celle qu’il partage avec Sada, Kichizo va avoir de plus en plus de mal à se passer de Sada et celle-ci va de moins en moins tolérer l’idée qu’il puisse y avoir une autre femme dans la vie de son compagnon. Kichizo demande finalement à Sada, pendant un de leurs rapports sexuels, de l’étrangler sans s’arrêter, quitte à le tuer. Sada accepte, l’étrangle jusqu’à ce qu’il meure, avant de l’émasculer dans un ultime geste. Elle écrit ensuite sur la poitrine de Kichizo, avec le sang de ce dernier : « Sada et Kichi, maintenant unis ». A son producteur français Anatole Dauman, le réalisateur japonais Nagisa Oshima dira : « Notre film doit devenir une arme bien efficace pour la lutte contre la censure franco-japonaise, contre la censure de nos deux pays. » De fait, lorsqu’il réalise L’Empire des sens en 1976, le cinéaste japonais Nagisa Oshima, enfant terrible de la Nouvelle vague nippone, brise tous les tabous en filmant la passion amoureuse à l’état pur et de manière frontale. Cet hymne à l’amour et au sexe reste aujourd’hui l’une des œuvres les plus insolentes sur l’obsession érotique et sa pulsion de mort. Autour de ce film d’une scandaleuse beauté, Carlotta a fait ce remarquable travail éditorial dont on sait qu’il a le secret. Voici en effet un beau double coffret ultra collector dans une restauration 4K et dans une édition limitée et numérotée à 3000 exemplaires. On y trouve L’empire des sens accompagné de suppléments comme l’histoire du film (41 mn) ou un documentaire (54 mn) de David Thompson et Serge July qui mêlant documents d’archives et entretiens réalisés en 2010, retrace l’histoire et la postérité du film et celle de son réalisateur. On y trouve aussi L’empire de la passion réalisé en 1978 par Oshima et La véritable histoire d’Abe Sada (1975) de Noboru Tanaka. Enfin le coffret (avec un visuel exclusif d’Adam Juresko) propose La Révolte de la chair, un livre de 160 pages (avec 45 photos d’archives) dans lequel Stéphane du Mesnildot relate le combat engagé par Oshima pour la liberté d’expression. Après avoir retracé le destin hors norme de la véritable Abe Sada, Stéphane du Mesnildot revient sur le scandale provoqué par le film comme par sa suite « à rebours », L’empire de la passion. L’ouvrage propose également le dossier de presse français de L’Empire des sens enrichi d’un texte inédit de Nagisa Oshima sur le montage de son film à Paris… (Carlotta)
UNE VIE
Fin septembre 1938, Hitler, en champion du principe des nationalités, décide de « libérer les Allemands des Sudètes » de l’« oppression » tchécoslovaque, promettant à l’Europe, « une paix pour mille ans ». Du côté de Prague, nul, pourtant, n’est dupe des visées du Führer. Et les familles juives peuvent craindre la solution finale… Pourtant, en 1938, entre Londres et Prague, un courtier britannique décide de tout mettre en œuvre pour sauver le plus d’enfants tchécoslovaques. Cet homme, Nicholas Winton, on le retrouve, dans l’Angleterre de 1987. Même âgé, Winton ne cesse de penser aux autres en militant dans des associations caritatives. Son épouse, elle, se désole de voir s’accumuler partout des cartons de documents, d’autant que leur fille, récemment maman, doit les rejoindre. Alors Nicholas décide de tout brûler. Mais pas question de faire disparaître une mallette en cuir. Elle contient le précieux « livre de Prague » avec des coupures de presse, des courriers, des listes avec des milliers de noms et surtout les photos des visages tristes des enfants tchèques… Avec son premier long-métrage, l’Anglais James Hawes signe un bon biopic qui réussit d’une part à rendre hommage à Nicholas Winton dont l’action, durant la dernière guerre, n’était guère connue et d’autre part à provoquer l’émotion, notamment grâce au jeu sensible de cet immense comédien qu’est Anthony Hopkins. Il incarne le vieil homme qui se retourne sur ses souvenirs, hanté par les noms et les photos des enfants qu’il n’a pu arracher à l’ignominie nazie. Un homme qui, dans la tourmente guerrière, s’est dit : « Je dois le faire ! » Et qui entendra un rabbin praguois qu’il doit convaincre de lui donner une liste d’enfants juifs à emmener vers l’Angleterre, lui enjoindre : « Si tu commences, tu achèves ! » Avec fougue et peut-être même un peu d’ingénuité, Nicholas Winton sauvera 669 enfants juifs. Une vie revient aussi sur l’événement qui a conduit à faire connaître cet Oskar Schindler britannique du grand public. En 1988, l’émission That’s Life de la BBC consacre une partie de son programme à Winton et à son « livre de Prague ». A cette occasion, Winton (disparu en 2015 à l’âge de 106 ans) retrouvera des enfants, désormais adultes, qui ont survécu grâce à lui. Alors, on peut entendre la litanie des noms des « enfants de Nicky » : Elsie, Petr, Jan, Marta, Esther, Vera, Hanus… (M6)
DAAAAALI !
Quentin Dupieux est un ovni dans le cinéma français ! Il réalise des films à la chaîne et conjugue le mot fantaisie à tous les modes. Sa rencontre avec l’univers de Salvador Dali était une évidence. Avec le premier plan du film sur un piano-fontaine, Dupieux, d’entrée, ramène le spectateur à l’oeuvre du peintre de Cadaquès et donne les règles du jeu. « On entre dans un monde où les pianos sont des fontaines infinies, où poussent des arbres, sur fond de paysage doré ». Voici donc un 12e long-métrage complètement foutraque, carrément délirant, positivement barré ! Mais sans jamais verser dans le n’importe quoi. Comment en aurait-il pu être autrement puisque le cinéaste confie : « Pour écrire et réaliser cet hommage, je suis entré en connexion avec la conscience cosmique de Salvador Dali et je me suis laissé guider, les yeux fermés. » Jeune journaliste, Judith Rochant semble tenir le bon bout puisqu’elle a l’inestimable chance de pouvoir interviewer l’immense Salvador. Voilà pour un semblant de trame car Daaaaaali ! s’embarque joyeusement sur ces brisées loufoques qui font le sel (et l’ordinaire!) des œuvres de Quentin Dupieux. Il faut bien cela pour cerner un personnage « excentrique et concentrique, à la fois anarchiste et monarchiste ». Un évêque sur un âne, une pluie de chiens morts, un repas qui prend une étrange tournure… Luis Bunuel est convoqué aussi… Enfin, on ignore si c’est le maître qui a soufflé à Queeeeeentin, l’idée de convoquer cinq comédiens pour interpréter son personnage, évidemment trop complexe pour un seul homme… Gilles Lellouche, Pio Marmaï, Jonathan Cohen, Didier Flamand et Edouard Baer s’emparent de Dali avec une joie manifeste. Quant à Quentin Dupieux, il s’amuse comme un fou à changer, d’un plan à un autre, d’interprète pour son singulier artiste. Anaïs Demoustier, dans le rôle de Judith, participe avec grâce au généreux vent de folie qui traverse Daaaaaali ! Dali le disait lui-même, sa personnalité était probablement son plus grand chef d’oeuvre. Avec drôlerie et déférence, mais oui, Dupieux nous le raconte ! On monte à bord de cette aventure surréaliste avec ravissement. (Diaphana)
GREEN BORDER
Ayant fui la guerre, une famille syrienne entreprend un éprouvant périple pour rejoindre la Suède. A la frontière entre le Belarus et la Pologne, synonyme d’entrée dans l’Europe, ils se retrouvent embourbés avec des dizaines d’autres familles, dans une zone marécageuse, à la merci de militaires aux méthodes violentes. Ils réalisent peu à peu qu’ils sont les otages malgré eux d’une situation qui les dépasse, où chacun -garde-frontières, activistes humanitaires, population locale- tente de jouer sa partition… C’est un sacré parcours que celui d’Agnieska Holland ! La cinéaste polonaise, aujourd’hui âgée de 75 ans, est remarquée dès 1988 avec Le complot sur l’assassinat du prêtre Jerzy Popiełuszko, membre de Solidarność, par la police secrète communiste. En 1990, elle signe Europa Europa, drame de guerre sur l’odyssée de Sally Perel. Dès le début des années 90, elle va travailler pour la télévision et réalise des épisodes des séries The Wire, Cold Case, The Affair ou House of Cards. Avec Green Border, entièrement tourné en Pologne, la cinéaste revient à des temps de guerre au coeur de l’Europe en nous amenant à voir à la fois des familles syriennes fuyant leur pays comme des Polonais qui ont décidé d’assister ces personnes maltraitées par l’armée de leur pays. « Ce ne sont pas des gens ! Ce sont des balles vivantes ! » dit un officier. Car les armées polonaise et biélorusse considèrent les migrants comme des ballots trimballés de part et d’autre des barbelés, sans aucune considération pour la vie humaine, et notamment les enfants qui composent ces groupes traqués dans un jeu inhumain. Agnieska Holland s’intéresse particulièrement à une psychologue qui décide d’aider un collectif oeuvrant dans la région : « On ne laissera plus jamais personne dans les bois… » mais aussi à un militaire qui excite ses hommes contre ces intrus présentés comme des combattants planifiant une invasion de la Pologne ! Agnieszka Holland qui a réalisé son film dans « un état d’urgence et de colère », a obtenu le prix spécial du jury à la Mostra de Venise tandis qu’Amnesty international lui décernait un coup de cœur. En Pologne, par contre, la cinéaste a fait l’objet d’attaques haineuses et antisémites. Le ministre polonais de la justice a comparé le film à de la propagande nazie, comme du temps où « les Allemands, durant le IIIe Reich, produisaient des films de propagande montrant les Polonais comme des bandits et des meurtriers ». (Condor)
VIVANTS
Ancienne guide de haute-montagne, Gabrielle, 30 ans, intègre une prestigieuse émission de reportages. Elle doit très vite trouver sa place au sein d’une équipe de grands reporters. Malgré l’engagement de Vincent, leur rédacteur en chef, ils sont confrontés au quotidien d’un métier qui change, avec des moyens toujours plus réduits, face aux nouveaux canaux de l’information. Habités par leur passion pour la recherche de la vérité, leur sens de l’humour et de la solidarité, ils vont tout tenter pour retrouver la foi de leurs débuts et se réinventer. Après avoir fait ses débuts comme journaliste-caméraman à l’agence Capa, Alix Delaporte s’est tournée vers le cinéma. Elle débute dans le « long » avec le touchant Angèle et Tony (2011) qui vaudra les César du meilleur espoir à Clotilde Hesme et Gregory Gadebois. Deux comédiens qu’elle retrouvera, en 2014, pour Le dernier coup de marteau. Avec Vivants, la cinéaste aborde un genre dans lequel le cinéma hollywoodien, de Bas les masques (1952) à Spotlight (2015) en passant par Les hommes du président (1976), excelle, en l’occurrence le film de journalisme. La cinéaste choisit de montrer la fin d’un monde, celui des grands reportages à l’international qui ont fait les belles heures de la télévision. Aujourd’hui les audiences sont en baisse et les responsables des chaînes sont de plus en plus tenus à des objectifs de rentabilité. « Petit à petit, dit-elle, les jeunes journalistes finissent eux-mêmes par s’autocensurer. C’est dommage, mais ça ne me rend pas pessimiste. » Ainsi elle met en scène le personnage de Vincent qui annonce l’arrêt d’une émission et s’adresse aux plus jeunes en leur demandant s’ils veulent vraiment s’accrocher à un programme qui a plus de quinze ans. « Inventez vos trucs », dit-il… Si Alix Delaporte a situé l’action dans une agence de presse, c’est pour pouvoir jouer aussi la carte du film choral, de chercher à montrer la vérité de personnages incarnés par d’excellents comédiens : Alice Isaaz, Roschdy Zem, Vincent Elbaz, Pascale Arbillot. Un film qui célèbre la beauté du journalisme ! Auquel on reprochera sans doute d’être hagiographique. (Pyramide)
LES TSIGANES MONTENT AU CIEL
Dans la Ruthénie subcarpathique au 19e siècle, profitant que les soldats austro-hongrois passent joyeusement la soirée au quartier, le tzigane Loïko Sobar et trois comparses s’emparent de leurs chevaux pour les vendre à un maquignon qui leur verse un acompte et promet de verser le solde à Pâques. En chemin, ils sont interceptés par des gendarmes qui tentent de les capturer, font feu et tuent les trois compagnons de Sobar. Blessé, Sobar s’échappe, mais finit par tomber inanimé dans des broussailles. Quand il revient à lui, une belle jeune fille le soigne avec de la « poussière de lune » puis disparaît. Désormais l’image de la jeune fille tzigane ne le quitte plus…. Alors que ses proches affirment que la jeune fille, prénommée Rada, est une sorcière, la tête de Sobar est mise à prix. La gendarmerie austro-hongroise vient saccager le campement des Roms et menace de tuer tous les chevaux. Menacé de ruine, le père de Sobar promet de leur montrer où son fils se trouve. En rentrant au campement Sobar découvre le désastre… En s’inspirant de récits de l’écrivain russe Maxime Gorki, le cinéaste russo-moldave Emil Loteanu (1936-2003) a imaginé cette aventure d’un voleur de chevaux au tournant du 20e siècle dans les steppes de la frontière ukraino-roumaine. Le cinéaste propose son projet aux studios Moldova-Film mais ce sont les studios russes de Mosfilm qui, en 1976, donneront naissance à cette fresque qui tient à la fois du western, de la romance shakespearienne et du musical façon Broadway ! Loteanu insuffle à son film un beau souffle lyrique dans une série de tableaux visuellement superbes qui s’intéressent aux visages de cette tribu joyeuse et tragique. Du beau cinéma ! (Potemkine)
BOULEVARD
Abandonné par son cafetier de père qui a refait sa vie avec une mégère abusive, Jojo habite seul dans une mansarde donnant sur la place Pigalle. Par orgueil vis-à-vis de ses voisins et notamment les parents italiens de la jeune Mariette, il s’efforce de ne pas avoir l’air seul, joue au dur et tombe amoureux de Jenny, une danseuse de cabaret, maîtresse de Dicky, un boxeur de seconde zone. Commence alors pour cet adolescent, la découverte d’un monde aux mœurs et activités déroutantes. En s’appuyant sur un roman de Robert Sabatier et un scénario de René Barjavel, Julien Duvivier, le merveilleux cinéaste de La belle équipe, Pépé le Moko ou Panique, réalise, en 1960, son 66e film (présenté dans une resauration 4K) sur une carrière qui en comptera 71, témoignant d’une véritable poésie de la jeunesse et de ses amours enfantins, exaltés par le parfum authentique du Paris des années soixante. Au moment où la Nouvelle vague s’apprête à bousculer les règles du 7e art, Duvivier engage, pour tenir le rôle de Jojo, l’épatant Jean-Pierre Léaud, tout juste sorti des 400 coups de Truffaut. Cette aventure qui fleure bon le Paris populaire de la place Clichy lui donne l’occasion de camper un presque gamin découvrant les règles impitoyables du monde des adultes. Un monde dont Jojo s’échappe en montant sur les toits pour observer combien c’est beau, une ville la nuit. Autour de Léaud, Duvivier réunit une jolie galerie de personnages défendus par Magali Noël, Pierre Mondy, Robert Dalban ou Jacques Duby. (Pathé)
LES COUPABLES
Sur une plage, dans les années 1900, des enfants font une macabre découverte, ce qui oblige le juge d’instruction Spiccaci à se rendre dans un petit village au sud de Naples pour mener une enquête. Les indices sur les auteurs du double crime mènent vers la Camorra, mais la peur et la corruption freinent l’enquête. Jeune et courageux, le magistrat travaille à partir d’indices fortuits et tente de reconstituer la dynamique du délit. Beaucoup de gens sont interrogés, même ceux qui sont apparemment au-dessus de tout soupçon. Décidé à aller au fond de la question, Spicacci met tous les suspects en état d’arrestation, ce qui provoque une réaction hostile de l’opinion publique. Face à la résistance passive générale, même de ses propres collègues, le juge découragé est sur le point d’abandonner l’enquête, mais un élément nouveau apparaît. Remotivé, le juge (Amedeo Nazzari) est prêt à « mettre toute la ville en résidence surveillée ». Souvent considéré, à ses débuts, comme un tenant du néo-réalisme rose, en raison d’un mariage entre des éléments mélodramatiques et des aspects de comédie de mœurs, colorée d’ironie grinçante, Luigi Zampa (1905-1991) signe, en 1952, Processo alla città (titre original), l’une de ses réalisations les marquantes, coécrite avec Francesco Rosi, et l’une des premières interprétations courageuses des phénomènes sociologiques liés à l’activité de la Camorra, la mafia napolitaine, notamment l’emprise sur les populations, et la figure de l’enquêteur incorruptible (ici un juge) qui continue à accomplir sa tâche, parfois au péril de sa vie… (Gaumont)
BOB MARLEY ONE LOVE
En 1976, la Jamaïque est en proie à un violent conflit armé entre le parti travailliste et le parti national du peuple. Dans ce contexte tendu, Bob Marley annonce que lui et son groupe The Wailers vont participer au concert Smile Jamaica organisé à Kingston pour promouvoir la paix. Peu de temps avant l’événement, Bob Marley, sa femme Rita et certains musiciens sont victimes d’une tentative d’assassinat à leur domicile. Rita et Bob sont hospitalisés mais remis à temps pour le concert alors que Don Taylor est le plus touché après avoir reçu plusieurs balles… Après avoir mis en scène La méthode Williams (2021), biopic sur Richard Williams et sur la façon dont il a entrainé ses filles Venus et Serena à la pratique du tennis, le réalisateur américain Reinaldo Marcus Green s’attaque à une icône musicale avec Bob Marley considéré comme l’un des artistes les plus prolifiques de l’histoire et largement célébré pour avoir fait connaître le reggae au cours de ses presque vingt ans de carrière avant de disparaître en 1981, emporté par le cancer. Au même titre que Walk the Line (2005) sur Johnny Cash ou Bohemian Rhapsody (2018) sur Freddy Mercury et Queen, Bob Marley One Love se range parmi les bons biopics que le cinéma a offert à la musique. D’autant que le metteur en scène ne se contente pas de passer en revue les étapes de la vie de Marley mais propose notamment un point de vue sur l’engagement du chanteur en faveur de la paix tout en mettant en lumière la spiritualité et la philosophie de vie Rastafari. Le britannique Kingsley Ben-Adir (vu dans Barbie) se glisse avec aisance dans la peau du musicien jamaïcain et porte un film riche en séquences musicales et qui évoque la fameuse tournée en Europe ou encore la création de l’album Exodus. C’est parti pour Get Up, Stand Up ! ou No Woman No Cry qui vont nous traîner dans l’oreille pour un moment. (Paramount)
LE CHATEAU DES AMANTS MAUDITS
En 1598, au château de La Petulla à Rome, le riche seigneur Francesco Cenci règne en cruel despote sur tous les siens. Ce patricien violent, dissolu et avide de jouissance, vient de faire assassiner son fils aîné. Sa seconde femme, de l’âge de ses fils, est devenue la maîtresse de son fils Giacomo… Lorsque Francesco meurt assassiné, l’enquête diligentée pour retrouver son meurtrier s’arrête sur son fils Giacomo, l’amant de sa belle-mère Lucrezia. Pour le défendre, Lucrezia accuse Olimpio Calvetti, l’intendant de Francesco, qui avait aidé Béatrice Cenci, la fille de Francesco. Soumise à la torture, Béatrice accuse également Olimpio, mais elle est condamnée à mort et décapitée au château Saint-Ange. Le personnage de Beatrice Cenci (1577-1599), la noble Italienne surnommée la belle parricide a inspiré les auteurs, de théâtre, de littérature (Stendhal, notamment), de musique et de cinéma. Dès 1908, Albert Capellani signe un film sur elle, suivi en 1909 par Mario Caserini. Le dernier film en date est celui de Lucio Fulci en 1969 intitulé, en français, Liens d’amour et de sang. Mais avant Fulci, c’est Riccardo Freda qui avec le superbe mais méconnu Château des Amants maudits, s’emparait librement de l’histoire de Béatrice (Mireille Granelli) en jouant sur l’atmosphère torve d’un mélodrame historique. Maître du cinéma populaire italien et de la série B, Freda (1909-1999) donne une touche gothique et colorée à cette aventure intime où il fait de Béatrice une jeune innocente broyée par une sale machination familiale. (Gaumont)
LA ROSE DE LA MER
Jérôme Jardehu et son oncle Romain possèdent, ensemble, un bateau, La Rose de la Mer. A bord de ce vieux cargo, ils naviguent avec une bande de forbans. Mais Jérôme comprend que son oncle, capitaine du bateau, et son équipage de malfrats ont décidé de couler le cargo pour toucher la prime d’assurance. Sur le point d’intervenir, il découvre à bord une passagère clandestine qui vient d’accoucher et meurt en lui confiant son enfant. Pour sauver le bébé, Jérôme tue un homme, parvient à ramener le cargo au port, et se rend à la justice. Peu connu du grand public, souvent injustement oublié, Jacques de Baroncelli (1881-1951) n’en reste pas moins un cinéaste prolifique. Lui qui débuta sa carrière en 1915, alors que le cinéma n’était pas encore parlant, a réalisé plus de 80 films. Tourné en 1946, La Rose de la mer est l’une de ses dernières œuvres cinématographique du cinéaste. En 1948, il tournera encore un Rocambole avec Pierre Brasseur dans le rôle-titre puis sa suite, La revanche de Baccarat. Passionné de littérature et ayant regretté toute sa vie de n’avoir eu une carrière d’écrivain, De Baroncelli adapte, ici, un roman de Paul Vialar, prix Fémina 1939, et plonge dans l’univers très masculin de la marine. Cette fois, il dirige Roger Pigaut (Sortilèges de Christian-Jaque, Antoine et Antoinette de Becker) dans le rôle d’un marin touché par la bonté face à Fernand Ledoux (Goupi mains rouges de Becker, La bête humaine de Renoir) en cruelle crapule. Un huis clos haletant (restauré à partir des négatifs originaux nitrate) qui cache en creux un touchant récit d’espoir et de rédemption. (Pathé)
LES CHEVRES !
Saviez-vous qu’au 17e siècle, les animaux pouvaient être jugés pour avoir commis un crime ? A Paris, en l’an 1691, un homme âgé raconte aux spectateurs l’histoire d’un procès, auquel il assista quarante ans plutôt en compagnie de son oncle, Maître Pompignac, qui a accepté de défendre sans le savoir une chèvre accusée d’avoir tuer Grégoire Hubert de Colombe, un Maréchal de France. Ce dernier marchait un matin le long d’une rivière où on le retrouva à moitié immergé dans le courant avec une blessure profonde dans la fesse et la chèvre à côté du corps sans vie. Maître Pompignac, risée du barreau, pense avoir trouvé l’affaire de sa vie. Mais c’était sans compter sur son adversaire, le redoutable et réputé Maître Valvert et surtout sur Josette ! Après un long procès où la défense et l’accusation rivalisent de spectacle pour gagner le public, il s’avère que la chèvre est innocente. En effet, Maître Pompignac démontre comment le vieux Maréchal s’est tué tout seul par accident. Après Le Jeu (2018) et Radin ! (2016), Fred Cavayé est de retour avec un film désopilant renouant avec la tradition des grandes comédies d’époque ! Le scénario est bien ficelé, les dialogues enlevés et tant Dany Boon (Pompignac) que Jérôme Commandeur (Valvert) s’ingénient, en cabotinant volontiers, à camper deux avocats hauts en couleur, qui se livrent un combat aussi féroce qu’hilarant. Le film s’achève avec l’homme du début et l’on comprend qu’il s’agit de Jean de La Fontaine, dont la carrière littéraire a démarré grâce aux nombreux procès que son oncle remporta en défendant systématiquement des animaux… (Pathé)
INSPECTEUR SUN ET LA MALEDICTION DE LA VEUVE NOIRE
Célébrissime araignée détective, Inspecteur Sun embarque dans un hydravion pour San Francisco après avoir enfin capturé son ennemi juré, le Criquet Rouge. Pendant le vol, le meurtre du Docteur Bugsy Epinestone l’entraîne dans une nouvelle enquête au cœur d’un complot qui menace à la fois le monde des humains et celui des insectes… Pur produit du cinéma d’animation espagnol, le film de Julio Soto Gurpide repose sur une histoire qui plaira autant aux jeunes spectateurs qu’à leurs parents. En effet, voici un flic renommé qui doit trouver l’auteur d’un crime, qui s’est déroulé en vase clos, au sein d’un avion reliant Shanghai à San Francisco, dans les années 1930. Un peu contre son gré, il est flanqué d’une jeune groupie qui voudrait qu’il lui apprenne les ficelles du métier. Les adultes pourront s’amuser des références au polar, à Agatha Christie et même aux femmes fatales, personnages classiques du film noir. Les plus jeunes s’amuseront de ces personnages aux corps d’insecte ou d’araignée. Bien sûr, question moyens, le cinéma d’animation ibérique ne peut rivaliser avec Hollywood mais il a, pour lui, un sens avéré du rythme, un design joliment coloré et un scénario digne de ce nom. (Blaq Out)