LE TUEUR, LE CLOCHARD, LA VICTIME ET LA SOCIÉTÉ DE LA RÉUSSITE

Little OdessaLITTLE ODESSA
Tueur à gages, Joshua Shapira est envoyé, un jour, par son commanditaire à Brighton Beach, le quartier juif ukrainien de Brooklyn, surnommé Little Odessa, où il vécut son enfance. C’est là que, quelques années auparavant, il avait exécuté le fils de Boris Volkoff, le parrain de la mafia du quartier. Cette fois, la mission de Joshua, type déprimé mais néanmoins d’une terrible et froide brutalité, est d’éliminer un bijoutier iranien véreux. Shapira se rend à contrecoeur dans le quartier alors que Reuben, son jeune frère, heureux de son retour, souhaite à tout prix reprendre contact avec lui. D’abord réticent, Joshua, qui craint de mettre son frère en danger, accepte quand il découvre que leur mère est mourante. Reuben vit encore chez ses parents, entre sa mère, Irina, douce et attentionnée, et son père Arkady, despotique vendeur de journaux, très soucieux de l’éducation de ses enfants. Le père avait chassé Joshua en apprenant ses activités criminelles. Lorsque ce dernier se rend à l’appartement pour revoir sa mère, Arkady gifle Reuben pour avoir ramené Joshua à la maison et Joshua frappe violemment son père. De son côté, Volkoff commence à se douter de la présence de l’assassin de son fils à Brighton. En 1994, James Gray signe un premier long-métrage au réalisme pessimiste où il est question de deux familles. La sienne propre dont il s’inspire largement mais aussi la mafia juive russe de Little Odessa dominée par un caïd paternaliste. En s’appuyant sur une distribution dominée par Tim Roth (Joshua) entouré de Vanessa Redgrave, Edward Furlong et Maximilian Schell, James Gray réussit d’entrée une chronique très puissante qui sort dans une belle édition Blu-ray… (Metropolitan)
IronweedIRONWEED – LA FORCE DU DESTIN
En 1938, Francis Phelan revient à Albany. 22 ans plus tôt, il avait quitté sa famille après avoir causé accidentellement la mort de son plus jeune enfant. Depuis, il erre en compagnie d’autres clochards et alcooliques. Après avoir retrouvé son vieil ami Rudy (Tom Waits) qui n’en a plus pour longtemps, il part à la recherche d’Helen, une ancienne chanteuse, clocharde elle aussi, qui fut sa compagne et son soutien ces dernières années. Révélé en 1981 par Pixote, la loi du plus faible, le cinéaste argento-brésilien Hector Babenco (1946-2016) connaît la consécration avec Le baiser de la femme araignée (1985) qui vaudra l’Oscar du meilleur acteur à William Hurt en 1986. En adaptant L’herbe de fer, le roman de Wiliam J. Kennedy (prix Pulitzer 1984), le cinéaste fait une entrée remarquée à Hollywood avec un hommage aux laissés-pour-compte de l’Amérique présenté dans une belle édition Blu-ray. Dans cette représentation sans fard de la pauvreté sur fond de Grande dépression, Jack Nicholson et Meryl Streep, tous deux nominés aux Oscars, sont bouleversants… (Carlotta)
Revoir ParisREVOIR PARIS
C’est une atmosphère de sinistre mémoire qu’évoque Alice Winocour… Avec cet attentat terroriste à Paris, on songe aux événements tragiques de janvier et de novembre 2015 avec l’attaque, notamment contre le Bataclan où se trouvait le frère de la cinéaste… « Pendant qu’il était caché, explique la cinéaste, je suis restée en lien sms avec lui une partie de la nuit. Eh oui , le film s’est construit à partir des souvenirs de cet événement traumatique, puis à partir du récit de mon frère dans les jours suivant l’attaque. J’ai expérimenté sur moi- même comment la mémoire déconstruisait, et bien souvent reconstruisait les évènements… » En s’appuyant sur ce vécu, Alice Winocour a construit un récit-puzzle sur une mémoire à reconstituer. Prise dans un attentat, Mia enquête dans sa mémoire pour retrouver le chemin d’un bonheur possible. Un chemin vers la résilience qui sera long et douloureux. Tout en muette souffrance, Virginie Efira est cette Mia qui cherche la main qui l’a sauvée en la maintenant dans le monde des vivants. (Pathé)
Dont Worry DarlingDON’T WORRY DARLING
Dans les années 50, aux confins du désert californien, Alice et Jack vivent dans un rutilant compound où la vie s’écoule, paisible, entre le travail des maris au Victory Project et les papotages des épouses. Mais Alice n’arrive pas à partager totalement l’optimisme béat de ce meilleur des mondes. Signant une aventure intime et paranoïaque, la réalisatrice Olivia Wilde imagine un thriller psychologique qui emprunte au film d’horreur comme au cinéma d’anticipation. Avec une belle imagerie fifties et d’excellents comédiens (Florence Pugh et Harry Styles), la cinéaste distille un récit attrayant mais grinçant sur une société idéale qui n’aurait que l’amour et la réussite sociale pour but ultime. Lorsque Frank , le gourou charmeur, mielleux mais bien inquiétant, entend « sauver le monde de lui-même », Alice sait qu’il ne lui reste plus qu’à prendre la porte du « paradis ». Mais y arrivera-t-elle ? (Warner)
Harlow Blonde PlatineHARLOW, LA BLONDE PLATINE
En 1928, à peine âgée de 17 ans, la jolie Jean Harlow (1911-1937) décide, pour échapper à la misère promise par l’incapacité de son beau-père (Raf Vallone) à les faire vivre, sa mère (Angela Landsbury) et elle, de devenir une star de l’écran. L’impresario Arthur Landau (Red Buttons) l’aidera à atteindre son objectif. Sa plastique irréprochable et sa chevelure absolument blonde lui permettront, malgré les embûches, de devenir le sex-symbol américain des années trente. En 1965, Gordon Douglas adapte le best-seller Jean Harlow, biographie intime et retrace l’ascension d’une étoile filante au succès fulgurant dans l’univers impitoyable d’Hollywood. Mimétique, Caroll Baker incarne cette star qui disait : « Les hommes m’aiment parce que je ne porte pas de soutien-gorge. Les femmes m’aiment parce que je n’ai pas l’air d’une fille qui leur volera leurs maris. Enfin, pas pour longtemps. » (Carlotta)
Tigre PresidentLE TIGRE ET LE PRESIDENT
« Il faut que tout change pour que rien ne change… » écrivait Tomasi di Lampedusa dans Le guépard. C’est peut-être ce qu’inconsciemment, se disait aussi Paul Deschanel. Le 11e président de la République française, ne fut chef de l’Etat que huit mois, du 18 février au 21 septembre 1920. Et il n’a pas laissé une trace mémorable dans l’Histoire de France, sinon pour une chute de train qui fit se gausser les gazettes. En prenant ses distances avec la reconstitution souvent académique des fictions historiques, (son modèle est l’Amadeus de Milos Forman) Jean-Marc Peyrefitte se penche sur l’oublié Deschanel (Jacques Gamblin lunaire et savoureux) aux prises (électorales) avec un illustre concurrent, Georges Clemenceau alias le Tigre (André Dussollier)… A l’assemblée, Deschanel lui lance : « Laissez-nous gagner la paix » et assène un rude « Vous êtes comme la guerre. Vous êtes fini… » Voici ainsi le portrait allègre d’un perdant magnifique en avance sur son temps. (Orange Studio)
Volets VertsLES VOLETS VERTS
Immense figure du théâtre et du cinéma français, Jules Mangin est au sommet de sa gloire dans les années 70. Il triomphe tous les soirs sur les planches mais cet homme éperdument amoureux sait que son coeur est malade et qu’il ne devrait pas boire… Avec un scénario de Jean-Loup Dabadie tiré de Simenon, Jean Becker donne une comédie dramatique pleine de verve, de charme et de mélancolie. Un écrin pour Gérard Depardieu, grandiose et tendre en frère en théâtre de Saturnin Fabre, Jules Berry, Pierre Brasseur, Raimu ou Sacha Guitry. Les volets verts est donc un film « à l’ancienne » (ce qui lui vaudra sans doute de se faire laminer par d’aucuns) qui ne cherche jamais à faire les pieds au mur et qui, évidemment, n’a pas l’ambition de bouleverser le 7e art. Jean Becker, le fils du grand Jacques (dont il fut, à quatre reprises l’assistant, la dernière fois pour Le trou en 1960) sait construire une scène, placer sa caméra, capter les bonnes vibrations, imaginer des temps forts, émouvants ou drôles, diriger des comédiens tous au diapason qui font parfois penser à ceux qui peuplent, en nombre, les films de Claude Sautet. Une poignante chronique d’un monstre sacré qui tire sa révérence. (ARP)
Tout Monde JeanneTOUT LE MONDE AIME JEANNE
Jeanne Mayer a tout pour être au top ! Les médias la désignent déjà femme de l’année lorsque son beau projet écologiste tombe tristement et lourdement à l’eau. Paumée et dépressive, elle part à Lisbonne pour tenter de vendre l’appartement de sa mère, récemment disparue. Dans l’avion, elle croise Jean (Vincent Lafitte), un ancien copain de lycée. Cinéaste et illustratrice (une petite créature raconte ce qui se passe vraiment dans la tête de Jeanne), Céline Devaux signe un premier long-métrage qui observe une jeune femme dont la vie est mise en désordre par un échec. « Je voulais aussi, dit la cinéaste, parler de l’inquiétude individuelle qui nous concerne tous (comment je me comporte, suis-je une bonne personne, comment me libérer de toutes les réflexions toxiques qui m’habitent) dans un monde d’inquiétude universelle (comment vivrons-nous dans vingt ans, quelle capacité d’action ai-je dans ce monde en déréliction). (…) Le pire c’est qu’on s’habitue presque à ça. En fait, si on analyse la situation, c’est quasiment la définition clinique de la dépression : se lever, savoir que tout est merdique et n’avoir aucune possibilité d’agir. » Blanche Gardin campe cette Jeanne qui a peur de tout dans un monde d’inquiétude universelle… (Diaphana)
A Propos JoanA PROPOS DE JOAN
Sur une route, de nuit, sous la pluie, une femme au volant de sa voiture, se raconte et se souvient. Elle se nomme Joan Verra et reviennent le coup de foudre de sa jeunesse avec un pickpocket irlandais, sa situation ensuite de mère célibataire, son travail d’éditrice tandis que grandit Nathan, son fils unique et chéri (Swann Arlaud)… Si l’allure du film a d’abord l’air classique, Laurent Larivière embarque ensuite le spectateur dans de complexes arcanes romanesques et temporelles autour des strates de la mémoire et de la reconstitution des souvenirs. Avec charisme, Isabelle Huppert habite brillamment cette intrigante Joan… (france.tv Distribution)
DiabolikDIABOLIK
Dans les sixties, Clerville, une ville (fictive) d’Europe, est terrorisée par un impitoyable et insaisissable voleur. On ne connaît ni son identité, ni son visage (toujours masqué), seulement son surnom Diabolik. Seule certitude : toute personne qui entre en contact avec lui meurt. Les frères Manetti adaptent la célèbre bande dessinée des sœurs Giussani et se concentrent sur la rencontre entre Diabolik et sa complice Eva Kant. Avec cette aventure d’une sorte de Batman qui aurait été un criminel, Marco et Antonio Manetti s’empare de l’univers des comics pour en tirer une approche « à l’italienne » bien vintage sur fond de faux diamant et de braquage… (Metropolitan)
Sauvée AmourSAUVEE PAR L’AMOUR
En 1850, la Californie vit les heures chaudes de la ruée vers l’or. Vendue à la prostitution lorsqu’elle n’était encore qu’une enfant, Angel ne connaît que la trahison. Après des années de violence, de dégoût de soi-même et de mépris, elle rencontre Michael Hosea. Pour la première fois, la jeune femme entrevoit un chemin de rédemption. Mais ses vieux démons ne tardent pas à ressurgir… Connu pour Paranoiak (2007), D.J. Caruso adapte un best-seller de Francine Rivers et met en scène, dans une reconstitution de qualité, une exaltante romance historique qui aborde un sujet toujours d’actualité : les violences faites aux femmes… (SAJE Distribution)

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