Les grandes dents de la jungle
Tout va pour le mieux à Jurassic World! Isla Nublar, au large du Costa-Rica, accueille un formidable parc à thèmes où l’on peut rouler sur l’herbe à côté des diplodocus, faire du kayak au milieu de dinosaures paisibles et aussi tout savoir de ces reptiliens préhistoriques qui titillent l’imaginaire des petits et des grands. Enfin, tout va pour le mieux, oui et non. Parce qu’un parc à thèmes, pour continuer à faire affluer les visiteurs, a toujours besoin de nouveautés. Ce que les propriétaires résument par « Plus grand, plus féroce, plus de dents ». C’est à Jurassic World que se rendent Gary et son grand frère Zach. Ils seront des VIP puisque leur tante Claire est la directrice du parc. Avant de partir, leur mère les avait prévenus: « Si un truc vous pourchasse, courez! »
De toutes façons, le spectateur, un rien attentif, aura remarqué, dès les premières images de Jurassic World, que les griffes noires et très crochues des bébés dinosaures qui cassaient leur coquille d’oeuf ne présageaient rien de bon. Comme si le brillant Giger d’Alien était passé par là… Référence pour référence, le réalisateur clôture cette mise en bouche par un clin d’oeil aux Oiseaux du bon vieux Hitch…
Avec Jurassic World, Steven Spielberg, cette fois, en producteur réveille une franchise qui avait vu le jour en 1993 avec Jurassic Park et avait rebondi, en 97, avec Le monde perdu. Dans les deux cas, il y avait déjà clonage de dinosaures et beaucoup de mauvaises manières puisque des individus peu fréquentables songeaient à se servir des bestioles à des fins peu recommandables. Autant dire que le scénario de cet opus n°3 n’innove pas vraiment. Dans le secret d’un laboratoire, des scientifiques ont mis au point un dinosaure génétiquement modifié nommé Indominus Rex. Ce redoutable mélange d’ADN divers et variés n’a rien donné de bon. Car force est de constater que, non seulement, Indominus Rex est une sale bête mais qu’en plus, elle sait se camoufler à merveille dans la jungle et, pire, qu’elle tue pour le plaisir… Dangereux comme tout, l’Indominus Rex mais tellement nécessaire pour faire marcher les affaires de Jurassic Wolrd car, comme le dit le propriétaire des lieux: « Un stégosaure, c’est comme un éléphant dans un zoo! ». On a bien compris que, dans son parc, Indominus Rex allait se comporter comme un pachyderme dans un magasin de porcelaines…
Depuis la sortie du film dans plus de 4000 salles aux Etats-Unis, les chiffres du box-mondial ont le tournis. Retenons un résultat: Jurassic World, en moins d’un mois d’exploitation, a déjà franchi le cap du milliard de dollars de recettes. Et ça ne s’arrêtera pas là. Pourquoi ce succès, alors que finalement l’histoire n’innove guère? Peut-être, parce que les dinosaures n’ont toujours pas fini de calmer notre goût pour les mythes et qu’ils sont, à leur manière, des répliques du Minotaure ou de l’Hydre de Lerne. Ensuite, parce qu’ici le plaisir du divertissement frissonnant est précisément mis en avant. Pop-corn movie donc mais avec un sens affûté, la plupart du temps, du tempo terrifiant. On sait que l’Indominus Rex est terriblement difficile à arrêter dans sa quête vorace. Et en face de lui, il n’y a qu’une poignée de personnages dont on se demande s’ils seront capables de faire face à la menace reptilienne. D’abord un gamin et son grand ado de frère (il n’arrête pas de regarder les filles), emblématiques clients d’un parc à thème. Pour s’occuper d’eux, la rousse tante Claire toujours vêtue d’une tailleur blanc immaculé et l’héroïque Owen Grady, digne petit cousin d’Indiana Jones et véritable pointure puisque sa spécialité, c’est le dressage des raptors… Il y a aussi une brochette de méchants dirigée par un gaillard dont l’idée est de faire des dinosaures clonés d’infaillibles armes de guerre. « Ah, si on les avait eu à Tora Bora », soupire ce type à l’âme noire. Si on vous dit qu’il n’arrivera pas jusqu’à la fin du film, vous ne serez pas surpris.
Si vous aimez voir de près les grosses dents de dinosaures tueurs, la fréquentation de Jurassic World vous ravira. On a beau se dire que ce sont des animatroniques, l’effet est saisissant. A la fin, les mordantes bestioles auront quand même mis un sacré bazar dans Jurassic World. Mais, dans le chaos, les gamins retrouveront leurs parents tandis que tante Claire (dont les vêtements virginaux ne sont plus qu’un souvenir) restera avec le cool Owen Grady. Question de survie, évidemment. Et de suite à donner à Jurassic World.
JURASSIC WORLD Aventures (USA – 2h05) de Colin Trevorrow avec Chris Patt, Bryce Dallas Howard, Nick Robinson, Ty Simpkins, Omar Sy, Irrfan Khan, Vincent D’Onofrio, B.D. Wong, Judy Greer. Dans les salles le 10 juin.