LE MAITRE DE FARÖ DE A A Ö
Ingmar Bergman est un metteur en scène, scénariste et réalisateur suédois, né à Uppsala le 14 juillet 1918 et mort le 30 juillet 2007 sur l’île de Fårö. Il s’est imposé comme l’un des plus grands réalisateurs de l’histoire du cinéma en proposant une œuvre s’attachant à des thèmes métaphysiques (Le Septième sceau), à l’introspection psychologique (Les Fraises sauvages, Persona) ou familiale (Cris et chuchotements, Fanny et Alexandre) et à l’analyse des comportements du couple (Scènes de la vie conjugale).
Voilà ce qu’un dictionnaire dit du maître de Fårö. Qui est l’égal de Visconti et de Fellini, de Renoir et de Godard, de Wilder et d’Allen. En un mot comme en mille, un monument du 7e art mondial.
Les auteurs de l’Abécédaire Ingmar Bergman A –Ö ajoutent : « Il était suédois (Oui, c’est vrai.) Il a réalisé des films existentiels en noir et blanc (Correct, mais, pas que.) L’un de ses personnages fut un chevalier médiéval jouant aux échecs avec la Mort (Oui, une source d’innombrables parodies, et une référence à l’iconographie médiévale.) Il portait un béret et vivait sur une île loin de tout (Oui, mais pas au même moment, ; il s’est débarrassé du béret avant d’emménager sur l’île de Fårö) ». Et de préciser : « Les images comme celles-là, bien que justes, sont moins dues à l’œuvre et à la vie de Bergman en elles-mêmes qu’aux multiples hommages, pastiches et autres allusions (Woody Allen, Monty Python, Les Simpson…) »
Alors cet ouvrage a pour vocation de mettre le travail artistique de Bergman en contexte et à élargir un peu le tableau. Une manière de guide, donc, pour se glisser dans le monde bergmanien ou encore une carte pour explorer des territoires neufs, jamais répertoriés de ce paysage magnifique. Avec 145 clés d’entrée aisément accessibles, le lecteur est invité à picorer anecdotes ou faits méconnus pour, évidemment, se glisser pleinement dans la vie d’œuvre de Bergman. Avec le plaisir de lire ces (grosses) notules dans l’ordre de son choix, au gré des envies ou simplement du hasard. Evidemment, par curiosité, on est allé voir au premier A comme Abba. Où il apparaît que le groupe pop suédois superstar partageait avec le cinéaste une fibre mélancolique, étant comme artistes, issus de cette melancholy belt des pays situés au-dessus de la 59e latitude. Quant à Lasse Hallström, il s’inspira visuellement de Persona pour le clip Knowing Me, Knowing You (1977). Quant au ö, on apprend que l’alphabet suédois se ne s’achève pas à la lettre z mais inclut, à la fin, trois lettres additionnelles : å, ä et donc ö…
A C, il est question notamment de confession qui peut être considérée comme la figure constitutive de l’œuvre bergmanienne avec Le Septième sceau, Persona ou Les communiants… On apprend aussi que Bergman était un spécialiste du divorce, un rêveur, un solitaire, qu’il adorait conduire (parfois comme un voleur de voitures), qu’il dirigeait sa mise en scène à l’oreille, qu’il a donné Karin, le prénom de sa mère adorée, à de nombreuses héroïnes de ses films ou encore, que, dans ses dernières années, selon le témoignage de sa gouvernante, il grignotait tous les jours à 15h, trois sablés de la marque suédoise Brago accompagnés d’un verre de jus de cassis…
On lit, à Love/Amour, qu’il n’y a pas un film de Bergman qui n’ait pas à voir avec le thème de l’amour et de l’affection qu’une manière ou d’une autre. Pour lui, l’amour était lié à la question de Dieu. La vision de Bergman peut probablement se résumer ainsi : dans un monde impie où tout est cassé, l’amour est ce qu’il y a de moins cassé. Comme le souligne ironiquement l’écuyer Jöns dans Le Septième sceau : « Si tout est imparfait dans ce monde, l’amour est parfait dans son imperfection. »
S’il est question encore du silence, du sexe, de la lumière, des femmes ou de la peur et du doute chez Bergman, on ne sait rien sur les goûts du cinéaste en matière de… football. Par contre, on apprend qu’en 1963, alors que les footballeurs de l’AC Milan étaient allés en Suède pour disputer un match de Coupe des clubs champions contre l’IFK Norrköping, les dirigeants du club milanais s’assurèrent que l’équipe auraient l’occasion de voir Le silence. Après le match (victoire des Italiens 3-6), les joueurs partirent en bus pour Stockholm voir le film. Et leur réaction fut enthousiaste. Même si certains trouvèrent que les scènes de sexe étaient « un peu extrêmes ». En ce temps où les footeux ont le casque sur les oreilles et les pouces sur leurs consoles de jeux, on croit rêver…
Bref, tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Bergman sans jamais avoir osé le demander !
ABECEDAIRE INGMAR BERGMAN A-Ö. sous la direction éditioriale de Martin Thomasson, traduit de l’anglais par Laure Gontier. Editions Carlotta. 144 pages, 12€. En librairie le 7 octobre.