LE RODEO, L’OMERTA, LES INDIENS, LA MUETTE ET LA VEUVE
LE CAVALIER ELECTRIQUE
Ex-champion du monde de rodéo, Sonny Steele est aujourd’hui à la dérive et vend son image à une marque de céréales. A Las Vegas, l’ex-vedette, grassement payée, va se rebeller parce qu’on s’en prend à sa chère monture. Hallie Martin, une journaliste de télévision (Jane Fonda), pense tenir là un sujet en or… Elle se lance à la poursuite de Steele, parti pour rendre sa liberté à son cheval. Avec Le cavalier électrique (1979), Robert Redford retrouve Sydney Pollack après Propriété privée (1966), Jeremiah Johnson (1972), Nos plus belles années (1973) et Les trois jours du Condor (1975). Ensemble, dans des paysages grandioses, ils réussissent une fable écologique doublée d’un road-movie romantique. Et ils brossent un tableau lucide et amer d’une société américaine soumise à l’argent. Un film à découvrir pour la première fois dans sa version restaurée. (Carlotta)
LA MAFIA FAIT LA LOI
En Sicile, sur une route de campagne déserte, un entrepreneur est abattu par un inconnu… Là-haut, dans la maison isolée, Rosa Nicolosi a-t-elle vu quelque chose ? Patron des Carabinieri locaux, le capitaine Bellodi, venu de Parme, mène l’enquête. Mais l’omerta règne et, protégés par le silence de tous, Don Mariano, un chef mafieux (l’Américain Lee J. Cobb), paraît intouchable. Avec, dans la collection Make my Day de Jean-Baptiste Thoret, Il giorno della civetta, Damiano Damiani adapte un roman de Leonardo Sciascia et tourne, en 1967, le premier film qu’il va consacrer à son sujet de prédilection : la mafia et ses rouages criminels. Franco Nero et Claudia Cardinale sont excellents au cœur d’une œuvre réaliste et engagée. (Studiocanal)
LA FLECHE BRISEE
Après avoir servi avec bio le cinéma de Lubitsch et Capra, James Stewart entame, en 1950, sa grande carrière dans le western. Il est dans Winchester 73 de Mann et dans ce remarquable Broken Arrow où Delmer Daves raconte l’histoire vraie de la rencontre entre le chef indien Cochise (Jeff Chandler) et Tom Jeffords (Stewart), ex-éclaireur dans l’Armée devenu un chercheur d’or désabusé mais probe. Dans l’Arizona de 1870, la guerre fait rage entre les Apaches et Blancs. La flèche brisée est considéré comme l’un des premiers westerns à donner une image positive des Indiens. Dans un entretien avec Tavernier, Daves dira que le film lui fait apparaître l’Indien comme « un homme d’honneur et de principes, comme un être humain et non comme une brute sanguinaire. » Magnifique ! (Sidonis Calysta)
SIBEL
Muette mais s’exprimant par la langue sifflée ancestrale des montagnes de la Mer noire, Sibel, 25 ans, vit avec son père et sa sœur dans un village isolé de Turquie. Rejetée par les autres, elle traque sans relâche un loup qui rôderait dans la forêt voisine et qui alimente les craintes et les fantasmes des femmes du village. Un jour, Sibel croise la route d’un fugitif blessé, à la fois menaçant et vulnérable, qui va poser un regard neuf sur elle. Avec Sibel, Cagla Zencirci et Guillaume Giovanetti racontent, en Turquie, une émancipation contrariée par le poids des traditions. Damla Sönmez, omniprésente à l’écran, est impressionnante en jeune femme solitaire mais jamais victime dans une fable engagée et progressiste. (Pyramide)
24 HEURES DE LA VIE D’UNE FEMME
En 1968 (le film sera dans la sélection officielle du festival de Cannes interrompu par les événements de Mai), Dominique Delouche adapte 24 heures de la vie d’une femme et transpose l’action du roman éponyme de Stefan Zweig (1927) en Italie sur les bords du lac de Côme. Veuve d’un lord anglais, Alice Scotland croise, dans un casino, en 1917, un beau jeune homme. Il la la séduit puis la déçoit sans qu’elle ait pu comprendre qu’il était un déserteur allemand. Danielle Darrieux (que le cinéaste retrouvera en 1975 dans Divine) est magnifique et émouvante en femme mûrissante et bouleversée par une passion brûlante et éphémère, défiant les bonnes manières dans une brève rencontre avec un bel inconnu… (Doriane Films)
CELLE QUE VOUS CROYEZ
Pour épier Ludo, son jeune amant, Claire Millaud, 50 ans, ouvre un faux profil sur les réseaux sociaux et devient Clara, superbe jeune femme de 24 ans. Alex, l’ami de Ludo, tombe immédiatement sous le charme de Clara. Adaptant un roman de Camille Laurens, Safy Nebbou réussit, avec Celle que vous croyez, le portrait complexe d’une femme face à l’âge, à l’abandon, au désir de séduire et de plaire encore. Dans un récit bien mené, Juliette Binoche, tour à tour lumineuse et désespérée, campe, avec beaucoup de finesse et de grâce, cette prof de fac qui voit un (dangereux) jeu virtuel et sentimental lui échapper lentement… (Diaphana)
SCHLOCK
Avant de devenir l’auteur célébré des Blues Brothers (1980), John Landis signait, en 1973, son premier long-métrage avec Schlock, comédie grotesque et absurde autour du Schlocktropus, une bête géante, considérée par un scientifique comme étant le chaînon manquant. Depuis trois semaines, la ville de Canyon Valley est le théâtre d’une série de meurtres sanglants. Point de serial killer en vue mais bien le « tueur à la banane », en l’occurrence un gorille âgé de 20 millions d’années. Landis (qui s’est glissé dans la peau du gorille) lance un clin d’œil hilarant aux films de monstres (de King Kong à La belle et la bête en passant par Frankenstein) avec ce Schlock qui va découvrir l’amour au côté de Mindy, une jeune aveugle qui le prend pour un chien… (Carlotta)
MOUCHE
Séductrice et révoltée, combative et abattue, Mouche se dépatouille d’un quotidien foutraque avec son bar à thé qui périclite, son ex ex ex excessivement romantique, sa sexualité comme une fuite en avant, sa meilleure amie disparue, sa sœur coincée, son beau-frère alcoolique et déplacé, son père lâche, son horrible belle-mère spécialement venimeuse etc. Avec la série Mouche (6 épisodes de 30 mn), Jeanne Herry, réalisatrice de l’excellent Pupille, adapte la série anglaise Fleabag pour mettre en scène l’errance parisienne d’une trentenaire à laquelle Camille Cottin prête sa tempérament comique mais aussi ses failles et ses doutes. Une comédie douce-amère et enlevée… (Studiocanal)
ARTIC
Dans le désert immense et glacé de l’Arctique, un homme lutte pour sa survie. Tout en lançant à intervalles réguliers des messages, il pêche du poisson dans des trous percés dans la glace, affronte le blizzard, se méfie des ours blancs et se réfugie dans la carcasse d’un petit avion accidenté pour dormir. Et il s’interroge aussi sur la possibilité de traverser ce désert de glace. Un jour, un hélicoptère le repère. Mais les choses ne se passent pas comme prévu… En s’abstenant d’expliquer pourquoi le malheureux Overgard est perdu en terre inconnue, le Brésilien Joe Penna dont c’est le premier long-métrage, réussit, avec Artic, à donner un ton plus insolite au classique survival d’autant que l’excellent Mads Mikkelsen, par son jeu intériorisé, ajoute une solide tension à cette aventure glacée… (M6)
SANG FROID
Plus mutique que Nels Coxman, tu meurs ! Il a bien du mal à se dérider, le conducteur de chasse-neige de Kehoe, luxueuse station de ski du Colorado. Mais lorsque son fils Kyle meurt d’une overdose d’héroïne, sa vie bascule. Nels ne croit pas une seconde que Kyle était toxicomane. Désormais il n’a plus que la vengeance en tête et Viking, un baron de la drogue, aura à subir sa rage froide et féroce. En 2014, le Norvégien Hans Petter Moland signait, pour les écrans norvégiens, Refroidis. Pour Hollywood, il reprend, plan par plan, son film dans Sang froid. Liam Neeson y endosse à nouveau un rôle de « vigilante » qu’il a déjà incarné dans Taken. Mais il le fait si bien ! (Studiocanal)
SANTIAGO ITALIA
Grande figure du 7eart transalpin et cinéaste fêté (La chambre du fils est Palme d’or à Cannes en 2001), Nanni Moretti signe, avec Santiago Italia, un remarquable documentaire qui rend compte, à travers documents d’époque et témoignages, de l’activité de l’ambassade Italienne à Santiago après le coup d’état de Pinochet, le 11 septembre 1973, contre le régime démocratique de Salvador Allende. L’ambassade a en effet donné refuge à des centaines d’opposants au régime du général Pinochet, leur permettant ensuite de rejoindre l’Italie. Un regard mélancolique sur la fin de l’Unidad Popular mais aussi un œuvre qui trouve un écho contemporain face à la situation politique actuelle en Italie… (Le Pacte)