Un ours en vadrouille à Londres
Voilà un film qui a toutes les chances (et les talents!) pour s’imposer comme l’une des belles surprises de la fin d’année, cette période où le spectateur est encore plus avide que le reste de l’année de divertissement. En attendant la trêve des confiseurs qui va remplir les salles comme un ballotin de chocolats, Paddington a déjà effectué un beau démarrage. La star du cinéma de fin d’année promet donc d’être un jeune ours péruvien venu se perdre dans les brumes londoniennes. Pour viatique, sa vielle tante lui a confié quelques phrases toutes prêtes où il est notamment question de la pluie qui s’abat régulièrement sur la capitale britannique…
Un petit ours reconnaissable à son chapeau rouge cabossé. DR
Ce que tous les adultes qui se font tirer la manche pour conduire leurs chers bambins dans les salles obscures, remarqueront, c’est clairement le soin apporté ici à un scénario joyeusement inventif. Hamish McColl et Paul King ont écrit une histoire qui s’appuie sur un personnage devenu une grande vedette de la littérature jeunesse. En 1958, le romancier britannique Michael Bond créait A Bear called Paddington et lançait une saga à succès puisque les ouvrages de la série L’ours Paddington ont été vendus à plus de 35 millions d’exemplaires et traduits dans quarante langues. Si Paddington appartient carrément à l’ADN des jeunes (et moins jeunes) Britanniques qui possèdent souvent sa peluche, le petit ours poli et bien élevé est en train de faire une entrée en fanfare sur le marché français. Et la voix, bien élevée elle aussi, de Guillaume Gallienne pour la version française, n’est sans doute pas étrangère à la chose non plus…
Parce que ses parents ont été tués au cours d’une énorme tempête au Pérou, un jeune ours est désormais élevé par sa vieille tante Lucy et son oncle Pastuzo. Lorsque Pastuzo disparaît à son tour, Tante Lucy décide d’envoyer son neveu à Londres. Elle se souvient que c’est de là que venait, il y a fort longtemps, Montgomery Clyde, géographe distingué et vaillant explorateur londonien qui leur avait appris les exquis secrets de la marmelade. D’ailleurs Paddington conserve toujours sous son chapeau, un sandwich à la marmelade. En cas d’urgence.
Hugh Bonneville est Henry Brown, le père de famille. DR
Lorsque, débarqué d’un cargo où il voyagea en passager clandestin, le jeune ours se retrouve à la gare londonienne de Paddington, il n’est qu’un étranger apeuré dans une ville, sinon hostile, du moins effrayante. Passe alors la famille Brown. Henry le père est un type frileux, expert en analyse des risques, peu enclin à s’intéresser aux autres et préoccupé surtout du bien-être et de la sécurité des siens. Mary la mère écrit des romans d’aventures. Excentrique et chaleureuse, elle ne peut rester indifférente au regard triste de l’ours et à l’étiquette accrochée à son cou: « S’il vous plaît, veillez sur cet ours. Merci. » Nommé Paddington comme la gare où il attendait ses sauveurs, l’ours va donc entrer dans la famille Brown. A la grande joie de Jonathan, le benjamin et au grand dam de Lucy, l’adolescente coincée qui n’imagine pas devoir dire à ses copines de classe qu’un ours a élu domicile chez elle… Quant à Madame Bird, la gouvernante des Brown, en bonne veuve de marin, il faut plus qu’un ours qui parle pour la déstabiliser…
Nicole Kidman incarne la redoutable Millicent. DR
La grande force de Paddington, outre la frimousse tendre d’un ours dont on oublierait presque qu’il est en images de synthèse, ce sont les personnages bien dessinés et une histoire de compassion et de tolérance qui se déguste aussi bien lorsqu’on a 6 ans que lorsqu’on a quatre décennies de plus. Parce que le réalisateur Paul King a imaginé, sur des musiques caribéennes, une ville de Londres intemporelle et idéalisée pour mettre en scène l’aventure d’un petit étranger en quête à la fois d’un toit et du sentiment de se sentir chez soi. Parce qu’il a choisi une belle méchante en la personne de Millicent, la dangereuse taxidermiste (un rôle où Nicole Kidman se régale) pour laquelle un ours du Pérou doit forcément se retrouver dans une vitrine du Musée d’histoire naturelle… Parce qu’enfin ce Paddington propose plusieurs niveaux de lecture. Les petits hurlent de rire lorsque Paddington fait des catastrophes dans la salle de bains des Brown et lorsqu’il se nettoie les oreilles (qu’il a très sales) avec des brosses à dent. Les adultes savourent des clins d’oeil à Born to be wild pour évoquer les jeunes années hippies de Mary et Henry Brown ou encore la séquence au musée où Henry, travesti en femme de ménage, affronte les hommages pressants d’un gardien… Quant à Madame Bird, elle ne craint pas de prendre une grosse cuite. Mais c’est pour la bonne cause.
Paddington est définitivement un animal d’excellente compagnie!
PADDINGTON Comédie (Grande-Bretagne – 1h40) de Paul King avec Hugh Bonneville, Sally Hawkins, Nicole Kidman, Julie Walters, Peter Capaldi, Jim Broadbent, Madeleine Harris, Samuel Joslin. Dans les salles le 3 décembre.