LES AVOCATS, LE COW-BOY, LE PATRON, LE MEDECIN ET UN ELEPHANT MYTHIQUE

LES INCONNUS DANS LA MAISON
Inconnus MaisonActeur-fétiche de Marcel Pagnol pour lequel il fut l’incontournable César de la trilogie marseillaise, le grand Raimu est, en 1942, devant la caméra d’Henri Decoin pour incarner Hector Loursat, un avocat qui fut célèbre mais qui vit désormais retiré dans sa vaste demeure où il a sombré dans l’alcoolisme. Une nuit, un coup de feu retentit dans la maison… Adapté d’un roman de Simenon et sur un scénario de Clouzot, Les inconnus dans la maison (produit par la Continental, la société allemande installée à Paris pendant la guerre, qui ne voulait sortir que des films… à l’eau de rose) est un drame très noir où un avocat à la dérive reprend du service dans un procès qui touche directement sa fille Nicole. La puissante plaidoirie de Loursat, portée par un Raimu au meilleur de son art, dénonçant le conformisme bourgeois est un grand moment de cinéma. (Gaumont)
LA VALLEE DE LA PEUR
Vallee PeurSouvent considéré comme un film mineur de Raoul Walsh, La vallée de la peur, réalisé en 1947, sort en version restaurée. Belle occasion de réévaluer ce western… psychanalytique. Au Nouveau-Mexique, à la fin du 19esiècle, Jeb Rand s’est réfugié dans un vieux ranch délabré pour échapper à des cavaliers qui veulent sa mort. Mais surtout, Jeb est hanté par les événements qui se sont déroulés dans ces lieux quand il était enfant. Des souvenirs douloureux qui lui reviennent par bribes. Une œuvre atypique, presque « freudienne », et remarquable. Au côté de la belle Teresa Wright, l’excellent Robert Mitchum, dans l’un de ses meilleurs rôles, campe un homme obsédé par son passé ! Dans les bonus du blu-ray, on trouve un documentaire (95 minutes) sur le cinéaste et la réédition du livre (184 p.) de Michael Henry Wilson : Raoul Walsh ou la saga du continent disparu. (Sidonis/Calysta)
MONSIEUR
MonsieurFils d’une riche famille de Mumbai, Ashwin pourrait mener une vie agréable en oeuvrant avec son père sur de grands chantiers de construction. Mais, pour cause de fiancée infidèle, il traîne misère dans son grand appartement sous le regard de Ratna, sa domestique… Avec Monsieur, sa première fiction, Rohena Gera, en s’appuyant sur des souvenirs d’enfance, distille une comédie douce-amère sur la confrontation de deux mondes que tout oppose et que rien, jamais, ne semble pouvoir réunir… Pourtant, Ashwin, le patron et Ratna, la bonne, ne cessent de se croiser, de cohabiter, de s’effleurer dans la demeure du premier. Mais alors qu’Ashwin semble baisser les bras, Ratna, elle, n’arrête pas de se battre pour sa propre vie mais aussi pour les siens. Une belle et touchante histoire d’amour impossible. (Diaphana)
UNE INTIME CONVICTION
Intime ConvictionDepuis que Nora a assisté au procès de Jacques Viguier, accusé du meurtre de sa femme, elle est persuadée de son innocence. Cette femme qui se débat avec une existence difficile, se met en tête de convaincre un ténor du barreau de le défendre pour son second procès d’assises. Au cinéma, le film de prétoire est un genre reconnu et à part entière. Avec Une intime conviction qui s’appuie sur la vraie affaire Viguier (hormis le personnage fictif de Nora), il trouve une puissante illustration. Avec une Marina Foïs battante et un Laurent Lucas mutique, Antoine Raimbault permet à Olivier Gourmet d’incarner, avec brio, le tonitruant et combattif Eric Dupont-Moretti. Impressionnant ! (Memento)
L’ORDRE DES MEDECINS
Ordre MedecinsPneumologue, Simon est, à 37 ans, un médecin hospitalier aguerri qui côtoie la maladie et la mort au quotidien et a appris à s’en protéger. Mais, quand sa mère (Marthe Keller) est hospitalisée dans un service voisin et que ses jours sont comptés, ses certitudes vacillent. Fils et frère de médecins, David Roux, en s’appuyant sur des aspects autobiographiques touchant à sa propre mère, réussit, avec L’ordre des médecins, une œuvre sensible et forte sur les liens familiaux. A travers le beau personnage incarné par un Jérémie Renier remarquable de sensibilité, se dessine un superbe portrait de praticien qui masque, derrière son apparente sérénité, des interrogations bouleversantes. De plus, le film donne une juste représentation de l’univers de l’hôpital. (Pyramide)
AN ELEPHANT SITTING STILL
Elephant Sitting StillPersonnages à la dérive, paysages urbains sinistres, univers d’extrême violence… C’est un monde sans joie, une terre en friche que raconte le cinéaste chinois Hu Bo dans An Elephant Sitting Still, son premier et unique film (Hu Bo s’est suicidé en 2017, peu après avoir achevé la post-production de An Elephant). Autour d’un mythique pachyderme toujours assis sans bouger du côté de Manzhouli, quelque part dans une lointaine province au nord de la Chine, une poignée de destins –un petit voyou, une fille maltraitée, un vieil homme, un adolescent triste- se croisent dans une quête crépusculaire. Voici une œuvre au long cours (3h44) dans laquelle il faut prendre le temps de s’immerger. Mais l’écriture de Hu Bo, avec ses longs plans-séquences, finit par véritablement envoûter… Un ovni de cinéma ! (Capricci)
HONKY TONK FREEWAY
Honky TonFreewayPilier du cinéma british des sixties, John Schlesinger (1926-2003) est connu pour des films à succès comme Macadam Cowboy (1969) ou Marathon Man (1976). Dans la collection Make My Day ! dont l’objectif est de dénicher des pépites, Jean-Baptiste Thoret a choisi de faire (re)découvrir le très méconnu Honky Tonk Freeway. Comme une version loufoque du Nashville d’Altman, voici une comédie où, sous l’impulsion de leur maire et pasteur, les habitants de Ticlaw, un bourg de Floride, vont tout faire, y compris peindre leur ville en rose, pour que la nouvelle autoroute ne détourne pas les touristes de leur petit paradis… Cuisant échec à sa sortie en 1981, le film, porté par des comédiens en verve, est un rude pamphlet de l’American Way of Life. (Studiocanal)
A DEUX HEURES DE PARIS
AAADeuxHeuresParisCharmante hôtesse de l’air, Sidonie élève, seule, Lolo, sa fille de 15 ans, née de père inconnu. Parce que l’adolescente s’interroge sur ses origines, Sidonie l’embarque dans un voyage en Baie de Somme à la recherche des pères potentiels. Objectif : récupérer un cheveu de ces messieurs pour un test ADN. Premier film de Virginie Verrier, A deux heures de Paris est une jolie comédie et surtout le beau portrait d’une jeune femme libre et épanouie, bien incarnée par Erika Sainte, qui revient sur les terres de sa (folle) jeunesse. Autour d’elle, cinq hommes (notamment Thierry Frémont, Fred Testot, Fréderic Pierrot) comme autant de souvenirs d’amours anciennes. C’est frais et plein de tendresse ! (Wild Side)
CONTINUER
ContinuerMère divorcée, Sybille ne supporte plus de voir son fils adolescent dériver dans une vie violente et vide de sens. Elle joue sa va-tout en entraînant Samuel dans un périple à travers le Kirghizistan. Avec deux chevaux pour seuls compagnons, mère et fils vont affronter un univers naturel, splendide et hostile, où ils se retrouveront face à eux-mêmes. Avec Continuer, le cinéaste belge Joachim Lafosse (dont on avait apprécié A perdre la raison et L’économie du couple) adapte un roman de Laurent Mauvignier et offre au duo Virginie Efira (qu’on a vu, à Cannes, dans… Sybil) et Kacey Mottet-Klein, deux personnages d’écorchés vifs, qui s’affrontent, tendrement, dans de vastes paysages… (Le Pacte)
COFFRET GUILLAUME BRAC
AAACoffretBracRemarqué en 2013 pour Tonnerre, son premier long-métrage autour d’un rocker sur le déclin incarné par Vincent Macaigne, Guillaume Brac fait l’objet d’un joli coffret regroupant deux de ses œuvres les plus récentes. L’île au trésor (2018) est un documentaire pour lequel le cinéaste a installé sa caméra, un été, sur une île de loisirs de Cergy-Pontoise, en région parisienne, vrai terrain d’aventures, de drague ou de refuge et d’évasion. Il explore un royaume de l’enfance en résonance avec les tumultes du monde. Réalisé en 2017, Contes de juillet réunit deux contes L’amie du dimanche et Hanne et la fête nationale qui sont deux jolis portraits de jeunes femmes… (Potemkine)
MY BEAUTIFUL BOY
AAABeautifulBoyOn avait applaudi le Flamand Felix Van Groeningen pour deux œuvres bien belges, c’est-à-dire au ton singulièrement décapant tout en ayant des accents tragiques: La mertitude des choses (2009) puis Alabama Monroe (2012). Passé de l’autre côté de l’Atlantique, le cinéaste belge s’empare, avec My Beautiful Boy, d’un gros sujet de société, en l’occurrence les addictions… Pour David Sheff, la vie de son fils Nicolas est toute tracée : il est promis à une prestigieuse carrière universitaire. C’est alors que David découvre que Nic est accro en secret depuis ses 12 ans à la méthamphétamine. Pour ce père effondré, commence une vraie bataille, celle de la survie de son fils. Steve Carell et Timothée Chalamet forment un solide et beau duo d’acteurs. (Metropolitan)

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